"C'est faux" : quand Lino Ventura défendait Jean Gabin sur un plateau de télé
© Gaumont
Invité d'une émission, Lino Ventura s'est emporté pour défendre la mémoire de Jean Gabin, attaquée par un ancien article signé d'un certain François Truffaut.
Lino Ventura était connu pour respecter certaines valeurs - au premier rang desquelles la fidélité en amitié - et pour son franc-parler légendaire. En témoigne son apparition à la télévision suisse en 1985.
"C'est faux, c'est ignoble"
Invité de l'émission de cinéma Gros plan, Lino Ventura découvre un extrait que lui lit Claudette, la co-présentatrice de l'émission. Dans la revue Arts, le jeune critique de cinéma François Truffaut avait écrit en 1959, à propos de Jean Gabin et Gérard Philipe :
"Ce sont des artistes trop dangereux qui décident du scénario ou le rectifient s'il ne leur plaît pas. Ils influencent la mise en scène, exigent des gros plans. Ils n'hésitent pas à sacrifier l'intérêt du film à ce qu'ils appellent leur standing et portent selon moi la responsabilité de nombreux échecs".
A cette lecture, le sang de Ventura ne fait qu'un tour, et sa réponse ne se fait pas attendre :
"C'est faux, c'est ignoble. Pour écrire ce que ce monsieur vient d'écrire, c'est qu'il ne connaissait pas Gabin et qu'il n'a jamais travaillé avec Gabin. que vous venez de lire 'il exigeait des gros plans' (...) Je ne comprends pas qu'on écrive des choses comme ça, aussi injustes, aussi bêtes."
"Je n'exige rien du tout"
L'autre présentateur de l'émission, Christian Defaye, relance tout de même l'acteur en insistant sur le fait que les plus grandes stars sont quand même assez attentives aux scénarios dans lesquels ils tournent :
"Bien sûr, mais je n'exige rien du tout", rétorque Ventura. "Je donne mon point de vue. Par exemple, je sais que je ne peux pas supporter [les directives] : 'à ce moment-là, tu prends le verre et tu bois', non, si je ne le sens pas, il faut que je le dise, je sais que je ne serai pas bon. Mais ce n'est pas une exigence, chacun peut donner son point de vue, on se rallie au point de vue du metteur en scène. Chacun apporte son petit grain de sable dans l'histoire."
Lino Ventura et Jean Gabin seront partenaires de jeu à six occasions, de Touchez pas au grisbi où Ventura ne joue qu'un simple truand (1954) au Clan des Siciliens (1969), et deviendront des amis proches, partageant une même vision de la vie et les mêmes valeurs. La mort de Gabin en novembre 1976 atteindra profondément Ventura, qui décèdera à son tour le 22 octobre 1987.
publié le 1 mars, Corentin Palanchini, Allociné
