"Ce film, je devais le faire maintenant" : pourquoi Ryan Coogler a repoussé Black Panther 3 pour réaliser Sinners ?

© Warner Bros
Ryan Coogler est de retour à la mise en scène avec "Sinners", un film pour lequel il a mis "Black Panther 3" en pause afin de se consacrer à ce projet plus personnel. Il explique pourquoi.
Trois ans après Black Panther : Wakanda Forever, le réalisateur Ryan Coogler est de retour avec Sinners, un film d'horreur qui se déroule dans le Mississipi au début des années 30.
Toujours emmené par son complice Michaël B. Jordan, qu'il dirige pour la cinquième fois (après Fruitvale station, les 2 films Black Panther et Creed), et qui tient ici un double rôle, Sinners suit deux frères jumeaux qui reviennent dans leur ville natale pour repartir à zéro. Mais ils comprennent qu'une puissance maléfique bien plus redoutable guette leur retour avec impatience...
Ce long métrage qui rappelle Une nuit en enfer de Robert Rodriguez est à la fois un film d'horreur, un film musical et le film le plus personnel de Coogler qui s'est inspiré de son histoire familiale pour l'histoire de Sinners.
Il annonçait à ce sujet lors d'un Q&A pour le lancement de la bande-annonce : "J'ai eu l'occasion de creuser la relation avec mon oncle. Il était d'une autre époque dans le Mississippi, et il ne parlait pas vraiment de cet État, sauf quand il écoutait du blues ou buvait une gorgée de Old Taylor Whiskey. Alors, il se remémorait des souvenirs.
Avec ce film, j'ai eu l'occasion de me plonger dans ma propre histoire ancestrale, ici aux États-Unis, un peu comme je l'ai fait avec les films Black Panther, en explorant l'ascendance générationnelle."
Un film pour se livrer au public
Dans une interview accordée à Deadline, Ryan Coogler explique d'ailleurs que Sinners est le premier film dans lequel il se livre vraiment au public.
"J'ai réussi à trouver un moyen de m'investir pleinement dans chacun de mes films, mais Fruitvale Station racontait une histoire vraie, déjà écrite par les faits. Creed, que j'ai réalisé en pensant à mon père, m'a permis d'entrer dans un univers, mais ça restait avant tout le projet de Sly Stallone, Irwin Winkler et Bob Chartoff. J'ai pu y apporter ma touche personnelle, le recadrer à ma manière, mais ce n'était pas complètement mon film.
Black Panther, c'était une mission de réalisation : j'ai été engagé pour le faire. Heureusement, le studio était ouvert à mon regard, à mon approche. Mais c'était un projet lancé depuis quatre ans, et dont le parcours a été bouleversé par la tragédie que nous avons tous traversée.
Et puis un jour, j'ai levé les yeux : j'ai deux enfants. J'ai pensé : "J'approche des 40 ans. J'ai une boîte de prod qui peut créer des choses. J'ai rencontré des publics dans le monde entier. Et qui peut dire, à mon âge, qu'il a déjà sorti quatre films en salle ?" Et pourtant... j'ai réalisé que je ne m'étais encore jamais vraiment livré au public.
Je n'ai encore jamais fait un film qui soit entièrement moi. Je n'ai encore jamais fait un film qui soit entièrement moi. C'est drôle, parce que quand je disais que je préparais un film d'horreur, les gens étaient surpris. Mais ceux qui me connaissent savent que j'adore ce genre. En réalité, si le public ne me connaît pas vraiment, c'est parce que je ne me suis jamais totalement dévoilé. Et j'ai eu peur de me réveiller un jour à 50 ans, toujours dans cette situation. Et qu'à ce moment-là, je n'aie plus rien à dire.
Ce film, je devais le faire maintenant. Avec les bonnes personnes, à ce moment précis. Sinon, je savais qu'il ne verrait jamais le jour. Et c'est exactement pour ça qu'il existe aujourd'hui."
Ryan Coogler a donc mis en pause Black Panther 3 (sur lequel il travaille désormais activement) afin de réaliser Sinners et faire, pour la première fois, un film profondément personnel, né de ses propres souvenirs, de ses obsessions et de ses émotions. Sinners n'est pas une histoire vraie, ni une continuation d'un univers existant : c'est un geste intime, un tournant artistique où Coogler s'autorise enfin à raconter une histoire qui lui appartient entièrement.
Sinners est à voir actuellement en salles.
publié le 20 avril, Laëtitia Forhan, Allociné