"Comme si des gens s'étaient fixé la mission de me détruire" : cette actrice et réalisatrice garde un souvenir amer de ce formidable film sorti il y a 15 ans

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Actrice et réalisatrice appréciée pour son indépendance et son franc-parler, Julie Delpy évoque dans le numéro de février du magazine Les Années Laser la singulière trajectoire de son excellent film "La Comtesse". Et décoche quelques flèches...
Voilà déjà près de 50 ans, depuis sa première apparition à l'écran aux côtés de son père en 1978 dans le drame historique Guerres civiles en France, que Julie Delpy promène sa silhouette à l'écran. Refusant son statut d'égérie romantique du cinéma français à la beauté diaphane, Julie Delpy part vivre aux Etats-Unis au milieu des années 90, d'abord à New York puis à Los Angeles, pour y mener une carrière avec un jolie succès, et même auréolée de deux citations à l'Oscar.
D'abord en 2005 pour celui du Meilleur scénario dans le formidable Before Sunset, co-écrit avec Richard Linklater et Ethan Hawke. Et en 2014 avec le 3e volet, Before Midnight, cette fois-ci au titre du Meilleur scénario adapté.
Appréciée pour son indépendance et son franc-parler, elle mène une carrière à double casquette -celle d'actrice et réalisatrice-, qui possède inévitablement ses hauts et ses bas. Elle s'en est confié dans le numéro de février du mensuel Les Années Laser, à la faveur de la parution en DVD de son dernier film réalisé, la comédie chorale Les Barbares.
Un film en avance de 15 ans sur "The Substance"
Elle évoque ainsi un film qu'elle a écrit en seulement cinq jours dès 2001, mais qui ne se fera qu'en 2009 : La Comtesse, grâce au succès rencontré par 2 Days in Paris.
Oeuvre formidable, doublée d'une approche visuelle austère "que j'ai voulu proche d'Ingmar Bergman, de Dreyer ou d'un certain cinéma japonais, soit aux antipodes de mes inclinations naturelles", La Comtesse évoque la singulière et sanglante histoire de la très fameuse comtesse Elizabeth Bathory, Hongroise du XVIème siècle qui développa une obsession morbide pour la jeunesse et la beauté. Au point de se tremper, dit-on, dans des bains de sang de jeunes vierges assassinées. Ce personnage historique, parfaitement authentique de surcroît, fut d'ailleurs une source majeure d'inspiration de Bram Stoker pour son Dracula.
Julie Delpy développe dans l'entretien accordé au magazine un parallèle intéressant avec le film de Coralie Fargeat, The Substance. Tout en décochant au passage quelques flèches en direction du festival de Cannes...
"Le sujet de mon film est un peu devenu une métaphore sur la condition des femmes, leur complexité, les diktats de la beauté, la peur de ne plus être désirée. Ce sont des thèmes qu'on retrouve aujourd'hui dans le film de Coralie Fargeat avec Demi Moore The Substance, au détail près que le mien est sorti voilà quinze ans et qu'il était peut-être un peu trop en avance sur certains sujets, au point qu'il n'est jamais sorti aux Etats-Unis".
La Comtesse sera effectivement un très douloureux échec au box office international, avec moins de 800.000 $ de recettes. En France, il n'a attiré qu'un plus de 120.000 spectateurs.
"Je dois être trop libre"
Julie Delpy ajoute : "Il m'a même valu de la part d'un réalisateur français célébré des mots très durs où il me reprochait de ne pas savoir où mettre ma caméra, comme si, par-delà les frontières, des gens s'étaient fixé la mission de me nuire, si ce n'est de me détruire. Même le festival de Cannes, où je n'ai jamais été invitée, n'a pas daigné regarder La Comtesse. Je dois être trop libre, trop indépendante, et il semble que cela dérange beaucoup".
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publié le 15 mars, Olivier Pallaruelo, Allociné