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Parthenope : de quel mythe s'inspire ce film sublime présenté à Cannes ?

© Pathé

Passé par la Compétition du dernier Festival de Cannes au mois de mai, "Parthenope" de Paolo Sorrentino est arrivé dans nos salles ce mercredi 12 mars. Le réalisateur italien film de nouveau sa ville de Naples, et s'inspire d'un mythe grec.

Ça parle de quoi ?

La vie, tel un long voyage, de Parthenope, de sa naissance dans les années 1950 à nos jours. Une épopée féminine sans héroïsme, débordante d'une inexorable passion pour la liberté, pour Naples et les visages de l'amour. Les amours vraies, inutiles et celles indicibles. Le parfait été à Capri d'une jeunesse baignée d'insouciance. Et qui se termine en embuscade.

Et puis tous les autres, les Napolitains, hommes et femmes, fréquentés, observés et aimés, désabusés et vitaux, leurs dérives mélancoliques, leurs ironies tragiques et leurs yeux un peu abattus. La vie, mémorable ou ordinaire, sait être très longue. Le cours du temps offre un vaste répertoire de sentiments. Et là, au fond, proche et lointaine, cette ville indéfinissable, Naples, qui ensorcèle, enchante, hurle, rit et sait nous faire mal.

Une sirène à Naples

Il y a bien eu cette infidélité en forme de détour par Rome dans La Grande Bellezza, qui ressemblait à un hommage à La Dolce Vita de son maître Federico Fellini. Ou bien cette escapade dans les Alpes suisses avec les personnages principaux de Youth. Mais la ville fétiche de Paolo Sorrentino, c'est Naples, où il est né le 31 mai 1970. C'est là que se déroule l'action de La Main de Dieu, qu'il décrit comme son opus le plus personnel, et il y reste pour les besoins de Parthenope.

Qui n'est autre que le nom de son héroïne, que l'on suit pendant plusieurs décennies, de sa naissance à nos jours. L'occasion pour le cinéaste de faire un double-portrait : celui de cette femme et de la cité napolitaine, dans un film épique à plus d'un titre. Parce qu'il nous propose un récit au long cours, aux accents d'odyssée amoureuse, et puise son inspiration dans la mythologie grecque et l'histoire, justement, de la sirène Parthenope.

Comme beaucoup de figures des histoires de l'époque, ses origines varient d'un auteur à l'autre. Mais la plus célèbre nous vient de "L'Odyssée" d'Homère, où elle fait partie des sirènes qui tentent de séduire Ulysse pendant son très long voyage vers son île d'Ithaque après la Guerre de Troie. Alors que ses créatures parvenaient à séduire les marins grâce à leur chant, et les forcer à se jeter à l'eau pour se noyer, le héros est parvenu à sauver les siens en leur ordonnant de se boucher les oreilles avec de la cire et de l'attacher au mât de son bateau.

Se sentant humiliées, elles se jettent dans les flots et s'y noient. Et Parthenope se donne la mort près de la ville de Naples, dont elle deviendra ensuite l'emblème et où un temple aujourd'hui disparu aurait été érigé en son honneur. D'autres textes affirment que c'est Junon, équivalente d'Héra dans la mythologie grecque, l'aurait transformée en l'une des pierres sur lesquelles la ville sorrentine a été bâtie, mais la résultat est le même : cette sirène est le symbole de la cité portuaire italienne.

Ce n'est pas son histoire que raconte Paolo Sorrentino dans son onzième long métrage. Mais il y fait évidemment référence, lorsque son héroïne naît dans la mer, ou quand il met en parallèle les pouvoirs de fascination exercés par Parthenope et Naples. Avec un aspect régulièrement tragique pour la première, présentée comme la femme la plus belle du monde et qui, telle une sirène, semble porteuse d'une malédiction car tout les hommes veulent l'aimer mais courent à leur perte s'ils s'y attachent trop.

Une "épopée féminine sans héroïsme"

De décennie en décennie, et d'expérience en expérience, la jeune femme va chercher sa place dans le monde, tenter de s'affranchir du regard des hommes et de ce qu'ils projettent sur elle grâce à son intelligence et ses traits d'esprit, dans un film qui parle de jeunesse, de liberté, de beauté et de temps qui passe. Avec des images sublimes, ce qui est la moindre des choses de la part d'un esthète de la trempe de Paolo Sorrentino, aussi fasciné par son actrice principale (Celeste Della Porta, magnifique révélation qui incarne parfaitement les aspects fascinant et insaisissable de l'héroïne) que par la ville qu'elle symbolise et dans laquelle elle évolue.

Pour la première fois de sa carrière, le cinéaste transalpin met une femme au premier plan de l'un de ses récits, et il la confronte notamment à Gary Oldman, qui fait un joli caméo dans la peau d'un écrivain déchu, alors que Parthenope est incarnée par Stefania Sandrelli (vue dans Divorce à l'italienne) dans les derniers instants de cette "épopée féminine sans héroïsme", comme on peut le lire dans le synopsis de ce film qui, visuellement, parvient à être aussi hypnotique que son personnage central, et vos apportera un peu de vitamine D grâce à ses images ensoleillées, qui tranchent avec les drames de la vie sentimentale de l'héroïne.

publié le 12 mars, Maximilien Pierrette, Allociné

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