Repérée dans la rue, elle est la Meilleure actrice de Cannes 2025 : qui est Nadia Melliti, la révélation de La Petite dernière ?

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Avec son tout premier rôle à l'écran, dans "La Petite dernière", Nadia Melliti a décroché le Prix d'Interprétation Féminine au Festival de Cannes. L'heure est donc venue de faire sa connaissance.
Lorsque nous la rencontrons à Cannes, ce vendredi 16 mai, nous sommes à quelques heures de sa présentation officielle. Mais un pressentiment ne nous quitte pas depuis le milieu de la matinée et notre sortie de la projection de presse de La Petite dernière : Nadia Melliti a tout pour être un beau Prix d'Interprétation Féminine, si le troisième long métrage réalisé par Hafsia Herzi ne décrochait pas le Graal.
Huit jours plus tard, au lendemain de la Queer Palm remportée par le film, c'est bien le nom de la comédienne qui résonne pendant la cérémonie de clôture, et elle succède ainsi aux comédiennes d'Emilia Perez, à Merve Dizdar (Les Herbes sèches), Zar Amir Ebrahimi (Les Nuits de Mashhad) ou encore Renate Reinsve (Julie (en 12 chapitres)) au palmarès, alors qu'elle n'avait jamais fait de cinéma auparavant. Ou quand cette Petite dernière devient une grande première flamboyante, qui sortira dans nos salles le 1er octobre.
"C'est une chance et une opportunité", nous disait-elle lorsque nous la rencontrons. "Et j'ai déjà fait pas mal d'interviews juste avant, donc j'appréhende moins celle-ci que je suis en train de mener avec vous." Parfait donc.
AlloCiné : Comment s'est passé le casting ? Comment Hafsia vous a choisie pour être l'héroïne de son nouveau film ?
Nadia Melliti : J'ai été repérée par Audrey Gini, qui est la directrice de casting. On s'est rencontrées à Châtelet, un endroit où je me balade assez souvent parce que j'aime bien aller sur les quais de l'Hôtel de Ville, du Pont-Neuf. C'est un endroit que j'affectionne et, ce jour-là, Audrey m'interpelle. Au départ, je pense que c'est une touriste et je me dis : "Est-ce que mon anglais est à jour ?" (rires) Et puis, finalement, on discute et elle me fait part de ce beau personnage et des enjeux du film, de manière très fluide d'ailleurs.
Donc je me suis dit : "Allez, pourquoi pas ?" Je suis assez curieuse dans la vie, donc je me suis dit que ces nouveaux apprentissages pouvaient être hyper intéressants et que ça valait le coup de tenter. Mais je croyais que c'était une blague au départ : je ne pensais pas que c'était vraiment sérieux. Finalement ça l'était et je suis très contente d'avoir eu l'occasion de ramener ce très beau personnage à Cannes, et surtout avec Hafsia Herzi, qui est une très grande réalisatrice, et de jouer avec Ji-min Park aussi, qui est une superbe actrice. Donc très fière, très honorée.
Hafsia Herzi : J'ai commencé le casting pendant l'écriture du scénario. J'avais déjà écrit trois versions, et j'ai très vite demandé à la production de commencer le casting le plus tôt possible, parce que je savais que ça allait être un personnage compliqué à trouver et qu'il fallait prendre le temps de le chercher. Donc on a fait un an de casting et, Nadia, je l'ai vue en photo. C'est la directrice de casting qui l'a approchée dans la rue et j'ai tout de suite eu un truc, très vite envie de la rencontrer. Elle a donc passé des essais, puis je l'ai rencontrée et j'ai très vite su. Très vite, j'ai su. J'ai rencontré d'autres personnes, mais à chaque fois, elle revenait. Quand on s'est rencontrées pour la première fois et que je l'aie vu partir de dos, je me suis dit : "Non mais c'est elle !"
Je me retrouve un peu en Hafsia Herzi, donc c'est vraiment une réalisatrice envers qui j'ai énormément d'admiration et de respect Nadia Melliti : A l'origine, moi je suivais un cursus de STAPS (Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives), dans le domaine sportif. Je n'avais jamais fait de cinéma auparavant, ni de théâtre, donc c'est une vraie première fois. Et c'est ma curiosité qui m'a amenée à postuler. Je ne connaissais même pas les films d'Hafsia mais j'ai fait des recherches après l'avoir rencontrée et je me suis intéressée un peu à sa filmographie et à son parcours, qui est un très joli parcours d'ailleurs. Je me retrouve un peu en elle aussi, donc c'est vraiment une réalisatrice envers qui j'ai énormément d'admiration et de respect.
Hafsia Herzi : Une fois que j'avais trouvé Nadia, j'ai bien sûr adapté le scénario à sa personnalité. J'adore le faire en fonction des personnes que je choisis. C'est pour ça que, souvent, je demande s'ils ont une passion, s'ils aiment le sport, ce qu'ils font... Quand je l'ai rencontrée, elle m'a dit qu'elle faisait un peu de foot donc je lui ai demandé de m'envoyer des vidéos, et là j'ai vu qu'elle en faisait très très bien. Je trouvais ça trop beau donc je me suis dit qu'il fallait que je l'intègre au film. Dans le live [de Fatima Daas], elle ne fait pas de foot, mais j'aime bien m'inspirer des gens qui vont jouer les personnages, réadapter, réécrire.
Comment avez-vous travaillé ensemble pour garder à l'écran ce naturel et cette spontanéité que vous aviez vus chez Nadia ?
Nadia Melliti : Tout a été très naturel puisque j'ai été énormément entourée sur ce tournage, et de manière très bienveillante et hyper tolérante quant au fait que je n'avais pas d'expérience. Les choses ont été simples de ce point de vue et, vous savez, on a énormément conversé avec Hafsia et Fatima. On a tout de suite eu cette complicité, cette fluidité qui ont fait que ce n'était pas un problème, et je me suis sentie très rapidement à l'aise.
Hafsia Herzi : Ça a été beaucoup de travail, de répétitions. Je fais vraiment des répétitions, un peu comme au théâtre, et pendant ces répètes, on discute, on va manger, on vit. On apprend à se connaître toutes et tous mutuellement pour se sentir à l'aise et en confiance. Et après, ça s'est fait naturellement. Mais de toute façon, elle a vraiment une intelligence de jeu. Une intelligence de jeu et de compréhension. Donc ça a été très facile. On a eu la chance de pouvoir bien répéter, donc tout était carré, organisé. Ensuite, c'est en fonction de chaque prise qu'on fait des petits réajustements, qu'on essaye des choses sur place. Mais moi, j'avais vraiment le personnage en tête, ses émotions, son ressenti. Tout était précis.
Et le résultat a donc valu à sa jeune comédienne un très beau Prix d'Interprétation Féminine. Et cette (petite) dernière n'exclut pas, à l'avenir, de suivre les traces de sa réalisatrice en passant elle-même derrière la caméra, même s'il est trop tôt pour le dire selon elle. Ce qui est certain, c'est que son triomphe et le coup de projecteur que lui offrent le Festival de Cannes ont tout pour lui ouvrir les portes d'une jolie carrière. D'actrice déjà, et peut-être de cinéaste ensuite.
Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Cannes le 16 mai 2025
publié le 24 mai, Maximilien Pierrette, Allociné