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Science-fiction : c'est l'une des meilleures héroïnes du cinéma et 37 ans plus tard, tout le monde l'a injustement oubliée

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Ce personnage féminin a marqué la pop culture et son héritage est extrêmement précieux. Retour sur une héroïne injustement oubliée, qui a bouleversé à jamais la science-fiction au cinéma.

© Orion Pictures

En 1988, un certain Paul Verhoeven dynamite le cinéma de science-fiction en nous proposant une oeuvre radicale, d'une violence exacerbée : Robocop. Le récit dystopique nous entraîne dans la ville de Détroit, gangrenée par le crime organisé.

Nous y faisons la connaissance de l'officier de police Alex Murphy (Peter Weller) ; ce dernier est laissé pour mort après une fusillade avec un gang de criminels endurcis. Il devient alors le parfait cobaye pour la création d'une nouvelle arme, un policier hybride mi-homme, mi-robot.

Une équipière loyale et puissante

Avant de devenir une machine, Murphy faisait équipe avec une partenaire compétente et redoutable, Anne Lewis, incarnée par Nancy Allen. Cette dernière va être un soutien indéfectible pour son équipier, l'épaulant pour lui faire retrouver une partie de son humanité perdue.

Et d'ailleurs, dans sa première scène, le personnage nous est présenté en train de tabasser un criminel récalcitrant dans le commissariat, sous les yeux de Murphy. Celui-ci n'intervient pas pour l'aider et ne fait pas figure de sauveur de la demoiselle en détresse.

Elle parvient à se sortir toute seule de cette situation difficile, ce qui était assez rare dans ce genre de productions à l'époque. Immédiatement, Lewis était montrée comme une héroïne balèze et implacable.

Subvertir les clichés

Dans les années 80, les héroïnes intrépides et charismatiques de la science-fiction se comptaient sur les doigts d'une main. Sigourney Weaver avait ouvert la voie grâce à Ripley dans les deux premiers Alien, et Sarah Connor (Linda Hamilton) avait commencé à prendre son envol dans Terminator en 1984. Cette dernière prendra vraiment une autre dimension dans le 2ème volet en 1991.

Entre Ripley et Sarah Connor, il y a donc eu Anne Lewis, policière valeureuse, tenace, loyale et puissante. Elle est souvent oubliée quand on cite les héroïnes de cinéma et c'est totalement injuste. Le personnage, campé avec force par Nancy Allen, est également une pionnière en matière de représentation des femmes à l'écran.

"J'ai reçu le script de la part de mon agent. Je l'ai sorti de l'enveloppe, et j'ai vu "Robocop". Je me suis dit : Ils vont changer ce titre, non ? C'est la première chose que je me suis dite. J'ai commencé à lire, pensant n'en parcourir que quelques pages. Mais je l'ai lu en entier immédiatement, et quand je suis arrivée au personnage d'Anne, j'ai ressenti une vraie passion pour elle. Je voulais désespérément jouer ce rôle", a-t-elle confié en octobre 2024 lors du Hollywood Show.

Robocop est certes le protagoniste du film, mais sans l'aide précieuse d'Anne Lewis, il n'aurait jamais pu se reconnecter avec sa part d'Humanité. Elle ne joue jamais le faire-valoir du comédien principal et n'est pas du tout sexualisée.

Personne ne remet jamais en cause son professionnalisme et surtout, c'est une partenaire essentielle de Robocop, participant activement aux combats et aux enquêtes. Leur relation est basée sur le respect mutuel, sans connotation romantique, ce qui était novateur pour l'époque.

Boussole morale

Par ailleurs, dans cet univers dystopique ultra-violent, elle fait jeu égal avec ses collègues masculins, tenant tête aux criminels les plus endurcis et à ses supérieurs corrompus. De plus, Lewis est aussi une sorte une boussole morale dans l'univers sombre dépeint par Verhoven dans Robocop.

Elle est notamment l'une des premières à reconnaître l'humanité persistante de Murphy derrière sa carapace cybernétique, renforçant le thème central du film : la lutte pour préserver son identité face à la déshumanisation. Entre force et fragilité, Lewis apporte une lueur d'espoir dans ce monde voué à la destruction, pris dans une spirale de violence sans fin.

Nancy Allen, souvent vue dans des rôles plus glamour ou vulnérables auparavant (Pulsions, Blow Out, 1941), a coupé ses cheveux et s'est durement entraînée pour donner vie à un personnage crédible de femme flic forte et inflexible. Cela a marqué les spectateurs de l'époque et contribué à l'iconisation du personnage d'Anne Lewis.

L'actrice a repris son rôle dans Robocop 2 et 3 en 1990 et 1993, mais n'a jamais retrouvé de personnages aussi marquants par la suite. Aujourd'hui âgée de 75 ans, elle a mis un terme à sa carrière en 2008 après un dernier rôle dans Quality Time, une oeuvre de SF passée inaperçue.

Cependant, l'héritage d'Anne Lewis a perduré, ouvrant la voie à d'autres héroïnes courageuses et indépendantes, comme Trinity dans Matrix, Katniss dans Hunger Games, Furiosa dans Mad Max Fury Road ou encore Eva Macarro dans Ballerina. In fine, en mélangeant force, intelligence, loyauté, et humanité, Lewis a complètement redéfini ce que pouvait être une femme dans un film de science-fiction et d'action grand public.

"Mon père avait été policier à New York, donc j'avais l'impression de connaître ce personnage. Je connaissais cette relation. Je me sens vraiment honorée d'avoir pu l'incarner, surtout dans le premier film, parce que la relation avec Murphy était tellement importante. Je dirais que c'est la première fois de ma carrière que j'ai reçu autant de lettres de jeunes filles qui ont été inspirées par elle. C'était quelque chose de très, très spécial", a déclaré Nancy Allen lors du Hollywood Show 2024.

publié le 3 septembre, Vincent Formica, Allociné

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