"Gaza, la Côte d'Azur du Moyen-Orient" : Franceinfo invite un hôtelier pour commenter la proposition de Donald Trump puis s'excuse d'un "traitement totalement inapproprié et regrettable"

© "Gaza côte d'azur" : FranceInfo invite un hôtelier pour commenter la proposition de Donald Trump puis s'excuse d'un "traitement totalement inapproprié et regrettable"
Pour réagir à la proposition de Donald Trump de transformer Gaza en "Côte d'Azur du Moyen-Orient", Franceinfo a invité en plateau le président de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie d'Île-de-France (UMIH). La chaîne publique s'est ensuite excusée.
Mais qui a bien pu avoir cette idée ? Mardi 4 février 2025, lors d'une conférence de presse organisée à la Maison Blanche, Donald Trump proposait que les États-Unis prennent le contrôle de la bande de Gaza. Après avoir déplacé les Palestiniens vers l'Égypte ou la Jordanie, le président américain fraîchement élu s'imaginait alors faire de ce territoire, en grande partie détruit par les bombardements israéliens, "la Côte d'Azur du Moyen Orient". Des propos qui ont profondément choqué la classe politique internationale.
Quelques heures plus tard, dans "L'heure américaine" sur Franceinfo, Julien Benedetto organisait un débat - entouré de plusieurs experts - sur cette nouvelle sortie de Donald Trump. Après une discussion sur la situation à Gaza, le journaliste a reçu en plateau Franck Delvau, président de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie d'Île-de-France (Umih), afin de décrypter le réalisme de la proposition émise par le président américain.Pendant plus de cinq minutes, les protagonistes vont donc discuter de la potentialité de Gaza de devenir la "Côte d'Azur du Moyen Orient". À l'écran, un bandeau s'affiche alors : "Gaza, Côte d'Azur : Et si c'était possible ?". "On a beaucoup parlé de l'aspect politique de cette proposition de Donald Trump. On va laisser la politique de côté un instant et on va accueillir Franck Delvau", lance alors Julien Benedetto à 22h27. "On a voulu vous inviter ce soir parce qu'on a envie de voir si cette proposition de Trump a vraiment vocation à exister sur le plan économique. On a beaucoup dit que Trump est aussi un promoteur immobilier, c'est comme ça qu'il négocie : la bande de Gaza en Riviera, est-ce que ça a du sens pour le professionnel du tourisme que vous êtes ?".
"Avant que demain Gaza devienne peut-être une French Riviera, il va y avoir quand même un peu de travail"En plateau, son invité du soir se dit "satisfait" de voir Trump "prendre l'exemple de la France, de la Riviera". "Ça permet de rappeler qu'on est la première destination mondiale en termes de tourisme avec 100 millions de touristes" développe Franck Delvau avant de faire un improbable parallèle : "Paris/Île de France est la première destination de tourisme européenne. C'est 2.300 hôtels, environ 200.000 chambres d'hôtels, 33.000 cafés/restaurants et 200.000 personnes qui travaillent dans l'hôtellerie/restauration. Donc vous voyez, avant que demain Gaza devienne peut-être une French Riviera, il va y avoir quand même un peu de travail".
Le président de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie d'Île-de-France (Umih) poursuit : "Et puis surtout, c'est la sécurité. Les touristes, dès qu'il y a la moindre chose... On l'a vu à Paris avec la grève des poubelles, tout de suite c'est des annulations ! Un touriste, il va là ou là, en fonction de ce qu'il se passe. Le touriste veut voyager safe. Donc Gaza : pourquoi pas, mais ce sera pas tout de suite, parce qu'il faut les infrastructures, un aéroport sûr, du personnel formé, et vous voyez le nombre d'hôtels à Paris : il y a beaucoup de travail".
70% des bâtiments détruits dans la bande de gazaEn reprenant la parole, Julien Benedetto rappelle alors les chiffres fournis par l'ONU récemment : "70% des bâtiments détruits dans la bande de gaza. L'ONU qui chiffre à 80 milliards de dollars le coût de la reconstruction. Cela prendrait plusieurs décennies. Et déjà un premier défi monumental, qui est de déblayer les dizaines de millions, je dis bien de millions de tonnes dans la bande de Gaza", précise le journaliste.
En plateau, David Rigoulet-Roze, chercheur à l'IRIS, réagit à son tour : "C'est tout le problème. On est très très loin d'un projet touristique et même d'une possibilité de reconstruction qui est impliquée par la supposée troisième phase. Là, pour l'instant, même la deuxième phase est hypothétique, celle où on verrait tous les otages libérés. Donc, c'est dire que la troisième l'est encore plus. Peu de gens se font beaucoup d'illusions sur sa pérennité possible".
A lire aussi : "Otages palestiniens" : Franceinfo présente ses excuses et reconnaît "une erreur inadmissible", le responsable suspendu
Sur les réseaux sociaux, la séquence de plusieurs minutes a rapidement provoqué un tollé. Face à la polémique, Franceinfo a posté un message sur X (anciennement Twitter) ce jeudi après-midi. "Une séquence totalement inappropriée et regrettable a été diffusée hier. Nous l'avons supprimée de notre site et déplorons ce moment", peut-on lire, précisant ainsi que la séquence a été retirée des replays de france.tv. Puremedias vous propose de découvrir la séquence dans la vidéo ci-dessus.
Ce nouveau dérapage intervient quelques jours seulement après une autre erreur de Franceinfo. Le 25 janvier dernier, la chaîne publique s'était attiré les foudres de la sphère politique sur les réseaux sociaux. En couvrant l'échange d'otages et de détenus entre le Hamas et Israël, la chaîne d'information en continu avait affiché à l'antenne le bandeau suivant : "200 otages palestiniens retrouvent la liberté", en ouverture de son "17h-20h". Très vite, la gronde est montée sur X, où plusieurs internautes ont fait part de leur indignation concernant la terminologie utilisée, alors que l'AFP, par exemple, avait employé les mots "prisonnier" ou "détenu" au lieu d'"otage" pour qualifier les 200 personnes libérées par Israël dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu entre l'État hébreu et le Hamas.
Trois heures après la diffusion de ce bandeau, Franceinfo a réagi en présentant ses "excuses aux téléspectateurs" sur les réseaux sociaux. "À la suite d'une erreur inadmissible, un titre totalement inapproprié concernant la situation au Proche-Orient a été brièvement diffusé dans un de nos journaux sur franceinfo canal 27. Le responsable a été suspendu", a-t-elle mentionné. Dans la soirée, la société des journalistes de la chaîne a également publié un communiqué au sujet de ce "titre inexact", évoquant de son côté "une confusion humaine dans la rédaction du texte" et disant regretter "profondément cet incident" qui "ne reflète en rien les valeurs fondamentales de rédaction".
publié le 6 février, Benjamin Rabier , Puremédias