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Gérald-Brice Viret impose une double page sur le cardinal François Bustillo, écrite par une journaliste de CNews, dans les colonnes de "Femme actuelle"

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Rachetés depuis 4 ans par Vincent Bolloré, les magazines du groupe Prisma voient depuis quelques semaines leur indépendance malmenée. Dernier exemple en date, une double page dans "Femme actuelle" consacrée au cardinal François Bustillo et écrite par une journaliste de CNews.

Gérald-Brice Viret, directeur général de Canal+ France et vice-président de Prisma Media - © BestImage

Depuis le départ de Claire Léost, présidente de Prisma Media, en août 2025, tout s'est accéléré. Le groupe a annoncé l'arrivée à son poste d'Arnaud Lagardère puis dans la foulée la nomination de Gérald-Brice Viret, le directeur général de Canal+, en tant que vice-président du groupe, plus particulièrement chargé des pôles "Femme, TV, Ludique, Découverte et Économique". Quelques jours plus tard, le patron de CNews, Serge Nedjar, était nommé directeur des rédactions des magazines de Prisma Media, groupe racheté en juin 2021 par Vincent Bolloré.

"La double page est faite par CNews et livrée clés en main"Des nominations qui n'ont fait que susciter l'inquiétude des salariés, voyant arriver dans leurs rédactions les hommes de confiance du milliardaire. Selon nos confrères des "Jours", Gérald-Brice Viret et Serge Nedjar se sont répartis les rôles : le premier s'occupe de "Voici" et "Femme actuelle", quand le second se focalise sur "Capital". Et déjà, leur influence s'est fait sentir, et leur interventionnisme dénoncé par les salariés du groupe.

"Tout de suite, Gérald-Brice Viret a essayé de faire changer deux couvertures, une de 'Femme actuelle' (où la rédaction craint une reprise en main sur fond idéologique comme l'écrit 'Les jours', ndlr), une autre de 'Télé Loisirs'. Il a réussi avec 'Télé Loisirs", confirmait fin septembre Emmanuel Vire, délégué syndical SNJ-CGT à Prisma Media, auprès de Puremédias. "Ce n'est pas pour des raisons idéologiques à 'Télé Loisirs' mais plutôt pour mettre du Canal+ à tous les étages", soulignait le syndicaliste. C'est donc à des fins promotionnelles et de valorisation de la marque Canal+ que la Une de "Télé Loisirs" de la semaine du 20 au 26 septembre était consacrée à Benjamin Lavernhe, héros avec Pierre Lottin du film "En fanfare", diffusé le 26 septembre en prime time sur Canal+.

Le dernier exemple en date concerne "Femme actuelle". Dans la prochaine édition à paraître ce samedi 11 octobre, la direction a imposé une double page consacrée au cardinal François Bustillo, qui publie un livre aux éditions Fayard, autre propriété de Vincent Bolloré. Publiée par nos confrères de "Challenges", elle est titrée "Le Christ est le coach qui nous apprend à vivre", l'interview est signée... Véronique Jacquier, journaliste bien connue des téléspectateurs de CNews puisqu'elle y est chroniqueuse dans l'émission "En quête d'esprit", programme dominical qui aborde des sujets spirituels et philosophiques depuis 2020. "La double page est faite par CNews et livrée clés en main", précise "Les jours".

Les syndicats dénoncent un "interventionnisme débridé" et du "cost-killing à tous les étages""Depuis un mois, c'est une tornade qui s'est abattue sur nous", a confié un membre du groupe dans les colonnes du "Monde". Mercredi 8 octobre, une assemblée générale s'est tenue au siège de Prisma à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) en présence de 350 salariés sur les 750 que compte l'entité, indique le quotidien. Les syndicats CFDT et CGT, à l'origine du rassemblement, avaient écrit le tract suivant pour appeler à la mobilisation : "Quatre ans de tranquillité et puis... le départ de Claire Léost, l'arrivée d'Arnaud Lagardère, et c'est le début de la guerre éclair : interventionnisme débridé et cost-killing à tous les étages".

Un PSE (Plan de Sauvegarde de l'Emploi, ndlr) visant 54 postes (dont 27 postes de journalistes) est en effet en cours au sein du groupe. Une phase de départs volontaires s'est ouverte le 18 août. Elle prendra fin le 10 octobre. Il sera alors temps pour la direction, que le SNJ-CGT accuse de ne pas avoir jouer franc-jeu, de comptabiliser le nombre de départs contraints à organiser pour atteindre le quota prévu. "Nous avons émis un avis négatif sur le PSE et signé un accord pour les conditions sociales de départ le 22 juillet", rembobinait Emmanuel Vire. "Le 23, le lendemain, Claire Léost nous annonçait le rachat de 'France Dimanche' et 'Ici Paris' et l'arrivée d'ici la fin de l'année de 30 journalistes. Sauf qu'avec le déclenchement de la clause de cession consécutive au changement d'actionnaire majoritaire, on sait qu'une dizaine de journalistes de ces deux titres ne nous rejoindront pas. Or, ces postes pourraient revenir à d'éventuels salariés licenciés. En ne nous communiquant pas cette information dont elle avait forcément connaissance la veille, la direction a fait preuve de déloyauté", estimait le syndicaliste auprès de Puremédias.

Autre conséquence de ce "cost-killing" dénoncé en interne, le gel des piges jusqu'à la fin de l'année sur tout le pôle "Femme", géré par Gérald-Brice Viret, forçant certains titres à faire une croix sur des articles et à réduire le nombre de pages leurs éditions.

publié le 9 octobre, Léa Stassinet , Puremédias

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